L’extrême cherté de la vie aura jeté dans les rues une population de malfamés qui squattent sans discontinuer les lieux où l’action caritative leur offre quelques subsistances insatisfaisantes. Dès les premières lueurs du jour, sous une chaleur caniculaire, ce sont des centaines de femmes et d’hommes, parfois accompagnés d’enfants, dont certains en très bas âge, qui déambulent à vive allure dans les artères de la ville encore endolorie par une débauche nocturne d’énergie.
C’est à travers des ruelles encore encombrées des fastes de la nuit que ces derniers se glissent avec une rare agilité entre les détritus laissés par ceux qui ont les moyens de s’offrir presque tout. Pendant que ces derniers sont encore, et pour de longues heures, dans les bras de Morphée, les démunis courent dans tous les sens à la recherche du moindre bout de pain ou d’un vulgaire légume qui pourra aider à concocter une soupe incertaine. C’est dans la proximité du marché de Aïn Sefra, là où la veille des marchands arrogants se seront difficilement débarrassés de quelques carottes rabougries ou d’un oignon en phase de putréfaction, que ces citoyens nécessiteux viennent chercher le moindre légume. Ici, ce sont surtout les tomates à la chair parfaitement entamée par des piqûres d’insectes et par des mouches voraces qui sont les plus recherchées.
Même quand elles sont complètement flasques, elles servent encore à donner une couleur à une chorba approximative. Une fois les décharges complètement retournées, hommes et femmes entament alors la tournée des boulangers et des points de distribution que des bienfaiteurs alimentent quotidiennement en provisions de premières nécessités. En effet, outre les quelques associations caritatives qui préfèrent préparer des repas et les distribuer, il y a également ceux qui distribuent des denrées alimentaires, soit dans leurs locaux, soit en faisant appel à de petites associations de quartiers. Ce sont ces associations qui servent de relais à un opérateur bien connu sur la place et qui fait dans l’action caritative depuis au moins deux décennies.
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